Quae legat ipsa Lycoris.
Virg., Ecl., X
AU ROI
SireCe n'est ni au Conquérant ni au Législateur, c'est à l'Ecrivain et au Philosophe que je dédie cet ouvrage. Vous avez daigné, Sire, m'interroger quelquefois sur mon travail; je vais vous en rendre compte dans le repos de ce palais, où vous avez égalé la magnificence de Luculle, après l'avoir surpassé par vos trìomphes.
Il y a longtems, que j'avois entrepris dans mes Dialogues d'aller par des chemins de fleurs, où les géomètres ne vont que par des sentiers d'épines, et d'expliquer Neuton méme à ce sexe, qui aime mieux sentir que connoître. Je viens de retravailler ces mêmes Dialogues, et de corriger dans un age plus mûr ce qui avoit été le fruit de la première jeunesse.
Tous les ouvrages, de quelque genre qu'ils soient, demandent l'homme tout entier. Mais j'ose dire, qu'un des plus diffìciles c'est le dialogue scientifique: sur tout lorsque les figures de géométrie, et les termes d'art doivent en être bannis; qu'il faut remplacer les uns par des équivalents pris dans les objets les plus connus, et les autres par le secours des descriptions. Mais ce seroit, Sire, abuser de votre tems, et peu connoître votre génie, que de vouloir vous prouver, combien il est drificile d'instruire l'esprit en parlant toujours à l'imagination, de suivre la méthode la plus rigoureuse et la cacher en même tems, et de donner à un traité de physique l'agrément, pour aìnsi dire, d'une pièce de théatre.
Le style n'a pas moins de difficultés. La proprieté des mots, la sagesse dans les métaphores, la justesse et la sobriété dans les comparaisons sont l'effet des talents, et de cet art plus rare encore que les talents, de cet art le plus difficile de tous, l'art d'effacer.
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